Depuis ma participation au Sun Trip 2019, sans surprise, mon cancer a continué à marquer des points. Et néanmoins je suis toujours là, et toujours en selle.
Malgré, depuis un peu plus d’un an, 12 métastases cérébrales, 4 séance de gamma knife pour tenter de les éliminer, des séances de radiothérapie sur les lombaires pour calmer des métastases osseuses, une constellation de petits points sur les poumons, l’apparition d’un premier point sur le foie. Actuellement des métastases cérébrales déjà traitées au gamma-knife résistent et continuent de grossir. L’un d’elles fait 2 cm et pourrait me provoquer rapidement des problèmes neurologiques autrement plus invalidants que les simples migraines actuelles. Dans les jours qui viennent, on doit me proposer une solution thérapeutique : chirurgie classique, une deuxième couche de gamma-knife ou rien en espérant que le 5ème protocole de chimiothérapie que je viens de démarrer sera efficace.
Malgré 10 ans de cancer après un diagnostic initial d’emblée catastrophique avec des métastases nombreuses, osseuses principalement.
Et pourtant ai-je la tête de quelqu’un qui a un cancer généralisé?
Hier et avant-hier encore, j’ai pédalé chaque jour 130 km avec 1500 m de dénivelé, toujours à vélo solaire bien sûr, et toujours bien accompagnée par Yannick et aussi ma fille. Les semaines précédentes nous avons réalisé l’ascension du col du Tourmalet, et une autre fois enchaîné la Hourquette d’Ancizan, le redoutable col d’Azet et le col de Peyresourde. Évidemment l’assistance électrique m’est indispensable, mais je sais que nombreux sont ceux qui renonceraient à l’effort que cela représente malgré tout.
Quand les gens me voient pédaler, qu’ils sont intéressés par mon vélo solaire, que l’on discute gaiement de technique et voyage, peuvent-ils imaginer un seul instant ma situation? J’avoue que j’ai de plus en plus de mal à parler de mon cancer à des gens qui me connaissent peu. J’ai peur de passer pour une mythomane.
Je ne crois en rien d’autre pour ralentir la maladie qu’en l’allopathie et la médecine classique. Je ne suis ni adepte de médecines douces ou alternatives, ni d’un quelconque régime , ni de ceux qui pensent que le moral influe ou que le cancer à une source psychologique. Je suis athée, j’essaie d’être le plus rationnelle possible, et incrédule généralement de tout ce qui n’a pas fait l’objet d’une expérimentation scientifique reproductible.
Ma seule potion magique, c’est le vélo.
C’est le shoot aux endorphines.
C’est l’évasion, le vent dans les oreilles, les moustiques sur les dents, le chant des oiseaux et des grillons, les odeurs de genêts ou d’acacias, le ciel bleu et le soleil qui donne toute cette énergie vitale qui permet d’avancer, à gogo, gratuite.
Le bénéfice que j’en tire est incroyable. Parfois il faut que je me fasse violence pour m’extirper de mon canapé, vaincre la fatigue et les douleurs, et même pour lever la jambe afin de la passer par dessus le cadre du vélo. Parfois quand je démarre j’ai le souffle court et l’impression que je ne vais pas aller plus loin que le bout de la rue. Alors dans ce cas j’augmente le niveau d’assistance électrique et je vais moins loin. Mais l’important c’est d’être parti. Car le lendemain je remonte sur mon vélo et la jambe se lève déjà mieux. Le cœur est plus léger, les douleurs s’estompent. Et je roule encore un peu plus, un peu plus loin, un peu plus haut. Et le soir, loin d’être plus fatiguée que le matin, j’ai encore la force de monter la tente, gonfler le matelas, parfois visiter, se balader. Puis généralement le sommeil m’attrape de suite et je m’endors sur mon matelas pneumatique comme cela ne m’arrive plus jamais à la maison.
Des études montrent qu’une pratique sportive intensive permet de diminuer les risques de récidives cancéreuses. Peut-être que ma pratique du vélo contribue à ralentir ma maladie. En tout cas s’il ne me guérit pas, le vélo m’aide à supporter, à tenir, à accepter de subir encore et encore, à me soulager. Il aide aussi, je pense, mes proches à supporter ce qu’il m’arrive. La joie est communicative. Ma joie est salvatrice.
Des associations s’occupent de monter des projets collectifs qui permettent d’embarquer des personnes malades ou sortant de la maladie dans des projets sportifs, des défis, des challenge qui combinent le groupe, l’effort et généralement le cadre en plein air. Je les salue. C’est exactement ce qu’il faut faire. C’est la bonne recette.
Voici des projets qui m’enthousiasment particulièrement :
- Ma formidable nièce, au travers de l’association Mouv’Azur propose et encadre plein d’activités physiques adaptées à des personnes de tous ages et forme, dans la région de Nice : https://www.mouvazur.com/
- L’association Vécolo prépare pour septembre un parcours en Corse en VAE destiné en priorité aux personnes ayant suivi un programme de retour au sport et à l’activité physique suite à une maladie invalidante, ou à un traitement médical http://vecolo.org/index.html.
- Tout près de chez moi « Les roses des Pyrénées », petite soeur des Roses du Québec, qui fait la promotion pour les femmes des bienfaits du sport sur la santé et leur propose un entrainement sportif adapaté, basé sur le vélo et la course à pied. https://lesrosesdespyrenees.com/
- « A la mer à vélo », monté par l’Association 4S qui amène sur différentes routes et sur des itinéraires de plusieus jours, chaque année, des femmes touchées par le cancer du sein. https://association4s.org/a-la-mer-a-velo-1/.
- L’association « Gravir ensemble » qui propose des ascensions solidaires et soutient la recharche dans la lutte contre les cancers des enfants https://www.gravirensemble.com
- Des tas de clubs d’aviron montent des dragons boats et embarquent des femmes touchées par le cancer du sein notamment pour participer à la Vogalonga de Venise https://www.ladepeche.fr/article/2016/06/08/2361008-les-dragon-ladies-ont-bien-rame-a-venise.html
Un grand bravo à tous ces acteurs du sport et santé!
Quant à nos projets de Sun Trip pour cet été?
Notre participation à une partie du Sun Trip France est prévue. Elle dépendra des traitements à venir, d’une éventuelle chirurgie, des séances de chimio et des prises de sang à caler…. Ma vision pour faire des projets se borne à une semaine. C’est aussi la limite des prévisions météos fiables… alors disons que ça dépendra de s’il fait beau !