Peu d’aventuriers ont abordé le sun trip comme une compétition.
A travers ce commentaire je ne veux pas occulter les performances extraordinaires des SunTripers qui ont marqué durablement de leur empreinte la mobilité solaire.
La rencontre avec autrui, le partage de valeurs, l’échange sont plus important à mon sens qu’une quelconque performance chronométrique.
L’objectif de ce projet était de démontrer que l’énergie solaire permettait de réaliser de bien belles choses sans aucune conséquence sur l’environnement.
Il n’en reste pas moins que l’on ne parcourt pas 12000 km sans une minutieuse et longue préparation physique et psychologique. Les entraînements effectués par tous les temps nous ont permis de nous forger un mental d’acier. Les contraintes imposées lors des sorties hivernales nous ont consolidé physiquement et psychologiquement . Il restait tout de même une incertitude et pas des moindres : comment l’organisme allait encaisser plusieurs centaines de km par semaine, durant trois mois, sans autres jours de repos que ceux imposés par la météo, le transport maritime ou les aléas technologiques.
Physiologiquement notre organisme nous envoie des signaux qui sont autant de messages que nous devons interpréter.
Pour ma part depuis deux ans les faces internes de mes genoux sont douloureuses. Nombreux sont les spécialistes à m’avoir “prescrit” la fin de mes compétitions sportives . Qu’à cela ne tienne il n’y a pas de défi sans sacrifices. Soixante séances de kinésithérapie m’ont été nécessaires pour atténuer mes douleurs et me permettre de supporter des entraînements de 150 km sur une base de 1000 à 1200 km /mois.
Quand bien même mes douleurs persistent la tentation d’aller au terme de cette aventure n’a jamais été altérée.
A partir du moment ou j’ai rencontré Mohamed, Youssef, Paul, Françoise et j’en passe j’ai puisé en leur force mentale ce dont j’avais encore besoin pour relever ce défit.
La plupart , sauf Youssef,qui ont un déficit physique, causé par la maladie ou l’accident, ou subit d’importantes opérations. Ils ont volontairement exclu de leur vocabulaire le mot échec. Ils l’ont remplacé par les mots joie de vivre, volonté, réussite, générosité … .
Ce sont probablement les plus belles rencontres faites durant cet été parmi les concurrents. Je ne parle pas évidemment du groupe des tarnais Cathy, François, Didier , Gilles qui sont devenu de vrais amis et dont les valeurs d’humanité n’ont d’égal que le courage dont ils ont fait preuve pour surmonter toutes les difficultés de ce périple.
Parmi les anonymes rencontrés durant l’aventure quelques uns m’auront surpris par leur générosité. Ne sachant rien sur eux et eux sur nous, nous avons partagé de courts moments de bonheur durant lesquels nous avons reçu de belles leçons de vie.Le dépassement de soi est une notion subjective. Mike Horn a parcouru, dans la région la plus hostile du monde, au pôle nord, des milliers de kilomètres dans des conditions effroyables en mettant souvent sa vie en danger. Je ne l’ai jamais entendu dire je met fin à cette aventure.
Mohamed Said et Youssef sont à mon sens, de la même trempe que Mike Horn, et sont incontestablement les deux plus grands aventuriers du Sun trip 2018. Ils n’ont jamais envisager mettre fin à ce projet même si la météo se déchaînait sur eux.
Youssef a fait ses études en France et de retour à Tanger il monte son atelier de fabrication, conçoit et fabrique plusieurs trikes. Mohamed qui n’a plus l’usage de ses jambes le contacte pour que celui-ci lui fabrique un engin adapté à son handicap.
Mohamed incarne la joie de vivre, accepte très bien son handicap, même s’il avait l’usage de ses jambes à la naissance. Il n’en fallait pas plus à Youssef, convaincu par cette forte personnalité , pour imaginer le projet de trike tandem. Il n’y avait qu’un pas à franchir pour que ces deux là relèvent le défi du Sun trip.
Leur mental est hors normes et le duo est doté d’un complémentarité extraordinaire qui leur a permis d’aller au terme de l’aventure.
Youssef a une formation de génie mécanique. Avec des moyens sommes toutes limités il crée son atelier, se dote d’outils informatiques et de logiciels de conception.
Très rapidement il imagine, modélise, et analyse le comportement de ses solutions en résistance des matériaux.
Il s’avère qu’elles sont terriblement efficaces. Son trike est doté d’une stabilité impressionnante. La structure de son châssis est conçue pour encaisser les efforts
se déformer et garantir une souplesse très appréciable par les cyclistes.
Un grand pas vers l’industrialisation pourrait être envisagé, ce serait un aboutissement bien mérité.
Même si le marché est restreint les prototypes imaginés par Youssef mériteraient d’être commercialisés. Ne serait-ce que pour répondre aux besoins des personnes à mobilité réduite.C’est à mon sens les deux héros du Sun trip 2018. Si le prix du dépassement de soi et de la générosité existait ils en seraient les lauréats incontestables”.