Suite des contributions proposées par les membres de la famille du Sun Trip, avec ce texte du suisse Jean-Claude Keller, fan de longue date, participant du Sun Trip Tour 2019, physicien et conférencier habitué des questions climatiques.
Il y a « urgence climatique » et les premiers symptômes des dérèglements climatiques à venir commencent à être visibles. Leur liste est longue : réchauffement, fonte des glaces, montée des eaux, canicules, sécheresses, feux de forêts, cyclones, acidification des eaux, etc … Les scientifiques ont établi que les activités humaines en sont la cause principale, notamment avec les rejets dans l’atmosphère de CO2, un gaz à effet de serre. À titre d’exemple, aujourd’hui pour tous nos besoins, nous consommons plus de 95 millions de barils de pétrole par jour, ce qui représente plus de 170’000 litres par seconde, dont une grande partie est utilisée pour la mobilité et les transports. Cette consommation de pétrole correspond à des rejets dans l’atmosphère de plus de 500 tonnes de CO2 par seconde.
Actuellement à l’échelle mondiale, la mobilité des personnes et le transport des marchandises reposent essentiellement sur la consommation de produits pétroliers (essence, diesel, fuel lourd et kérosène). Il y a deux raisons principales qui expliquent ce « succès ». Premièrement, ces produits sont liquides à température ambiante, donc il n’y a aucun problème de stockage et de transvasement, car des réservoirs et des cuves suffisent, et leur remplissage peut se faire extrêmement rapidement ! Deuxièmement, ces produits ont une grande densité d’énergie, environ 10 kWh d’énergie par litre pour un prix de moins de 2 euros ! À titre d’exemple, sous nos latitudes pour produire 10 kWh avec 1 m2 de panneaux photovoltaïques placés normalement sur un toit, il faut une cinquantaine d’heures d’un bon ensoleillement. On comprend donc facilement que ces produits pétroliers liquides se soient imposés dans les secteurs de la mobilité et du transport où il s’agit d’emporter avec soi le maximum d’énergie dans le plus petit volume possible !
Au vu des dérèglements climatiques à venir, il s’agit de renoncer aux carburants fossiles au plus vite et dans tous nos secteurs d’activité. Dans le domaine de la mobilité, les alternatives sont l’électricité, l’hydrogène, l’air comprimé et la force musculaire. Rappelons que le gaz naturel n’est pas une alternative puisque sa consommation rejette du CO2, et que les marchés du biogaz et des biocarburants n’ont pas une taille suffisante pour jouer un rôle important. L’air comprimé n’est pas non plus une solution envisageable à large échelle, son usage est limité par la faible quantité d’énergie contenue dans un réservoir, 200 litres d’air comprimé à 300 bars correspond à environ 1 litre de pétrole, soit 0,05 kWh par litre. De plus, le rendement du moteur à air comprimé est bien inférieur à celui d’un moteur électrique.
Si l’on veut se passer du pétrole pour la mobilité et le transport, il reste le système électricité avec batterie qui alimente un moteur électrique et l’hydrogène avec pile à combustible qui alimente aussi un moteur électrique. Pour stocker l’électricité à bord du véhicule, on utilise des batteries lithium–ion dont la capacité est d’environ 0,25 kWh par litre. Pour le stockage de l’hydrogène, on le comprime à 700 bars, puis on l’injecte dans un réservoir ad hoc, et dans ces conditions, on peut stocker environ 1,4 kWh par litre. Mais l’hydrogène et l’électricité ne sont pas à disposition sur terre comme le pétrole, il faut les produire avec une autre forme d’énergie, si possible renouvelable, soit : hydraulique, solaire photovoltaïque ou thermique, éolien, marée-motrice ou houlo-motrice. D’un point de vue technologique, tout cela est réalisable, c’est seulement une question économique d’une part et de réseau de distribution d’autre part, la solution hydrogène avec pile à combustible étant pour l’instant plus chère que la solution électricité avec batterie.
Dans le secteur de la mobilité individuelle, le vélo avec assistance électrique au pédalage est une des solutions les plus sobres énergétiquement parlant pour transporter une ou deux personnes. Ce sont des véhicules légers et hybrides puisque l’énergie musculaire du pédalage est assistée par un moteur électrique. Depuis quelques années, ces vélos rencontrent un succès retentissant dans la plupart des pays développés. Pour augmenter l’autonomie de ces machines, il est possible d’ajouter des panneaux photovoltaïques qui fournissent de l’électricité par beau temps, le vélo devient alors électro-solaire ! Avec des journées ensoleillées, il devient possible pour des personnes de toutes conditions physiques et de tous âges d’avoir une autonomie entre 100 et 150 km par jour. Florian Bailly a mis sur pied l’aventure du Sun Trip sur ce principe, dans l’idée de promouvoir un nouveau type d’itinérance, celle des vélos électro-solaires ! Cette aventure s’inscrit dans la lignée des grandes aventures du XXIème siècle, celles qui montrent la voie à suivre pour sortir des énergies fossiles ! Longue vie au Sun Trip !
Jean-Claude Keller – Physicien et participant du Sun Trip Tour 2019